Ce que je vois !
Règle N°1 :
Quand vous vous baladez dans la campagne, il est important de ramasser un bâton et de le garder à la main durant toute la promenade (surtout si vous avez moins de 20 ans)
Règle N°2 :
Surtout, ne restez pas groupé, afin de limiter la casse dans le cas improbable ou une Bête chargerait (au choix en fonction de l'âge : vache, loup, sanglier, dragon....)
Ce que je vois !
Ce que je vois !
Ce que je n'ai pas vu !
Faut que je vous raconte...
Pas la semaine dernière, l'autre avant encore, le vendredi 20, vers 10h30, il devait y avoir une putain d'éclipse visible d'ici, un truc à presque 85%, pas comme en 1999 avec l'eclipse totale, mais quand même quoi, un truc qui vaut le déplacement. A la radio, la veille, sur la route, ca donnait envie de les entendre en parler comme ça...
Et pis les enfants nous avait dit qu'on leur sucrait la récré, faute de protection occulaire (enfin zon pas di comme ça hin!!!) pour tout le monde, ils resteraient tous dans la classe, pour ne pas être tenter de se griller les rétines....
Et pis de toutes façons, l'éducation Nationale et Nadjat ne voulaient pas que les gosses regardent l'eclipse alors yavait eu des zordes et les maitresses, elles zaiment bien les zordes de là Haut, ca les dédouane....
Bref, vers 9h30, je me fais un tit café, avec un gros carré de choc, on sait jamais, il fait pas bien chaud quand même ce 20 mars dernier, vaut mieux se blinder en calories au cas ou...
Vers 9h45, je sors dehors avec le trépieds, j'installe mon appareil, je règle, je vise, en me disant que le soleil est sûrement par là de mémoire....ben voui, avec le brume qu'on avait ce jour là, pas moyen de voir ou il était le bougre....et accessoirement, pas moyen non plus de se brûler les yeux !
Bref, je clique et j'obtiens ca :
Bon, il fait froid quand même, c'est limite si on voit pas les petites gouttelettes d'eau en suspension tellement l'atmosphère est saturée d'humidité....Alors plutôt que de rester sur place à attendre encore une grosse demi heure, je me dis que je vais m'occuper du potager. Je chope la bêche et je commence à me réchauffer en retournant le terre....
Au bout d'un moment, il fait un peu plus sombre, j'en profite pour faire une pause et reshooter :
Il fait pas encore nuit, mais ca vient, ca vient, ca va venir....mais pour l'instant, les zoziaux de jour piaillent encore.
Je retourne à ma terre, je gère le petit qui veut me donner un coup de main avec sa pelle en plastok en même temps, bref, je m'occupe en attendant le moment où les zoizeaux de jours vont se taire et ou les zoizeaux de nuit vont sortir (comme en 1999 quoi !)
J'ai déjà bien retourné 10m² de terre quand je vois ma femme sortir de la maison, habillée d'un manteau, d'un bonnet et d'une écharpe. S'installe un dialogue entre elle et moi :
-ben kestufai ?
-ben je vais chercher les gosses !
-Ben il est kel heure ?
-ben il est l'heure !
-Mais et l'eclipse alors?
-ché pas moi, mais là il est 11h20, fauk jy aille.
-...mais et ma photo alors? et les chouettes ? elles sont où ?
- ben dans ton c...
En normandie on dit souvent "ben..."pour commencer les phrases, c'est comme ça, faut pas chercher...
En conclusion, le potager est fin prèt à recevoir nos plantations, mais pour voir la nuit en plein jour, va falloir que j'attende encore un peu...
Ce que je vois !
Ce que je ressens !
J'aime des matins comme aujourd'hui (-5°c), ou le givre recouvre tout dans la campagne, ou chacun de mes pas fait crisser l'herbe cristallisée, ou chaque expiration se transforme en vapeur, ou le soleil nous aveuglent, à défaut de nous réchauffer...
Ces matins comme aujourd'hui sont toujours suivi d'une belle journée ensoleillée, pleine de lumière et....
....c'est bon !
Ce que j'entends !
A ma tête qui se creuse, à ma voix qui se roque et qui se graille.
Je ne reviendrai plus. Ces histoires sombres vous épuise, c'est ça ?
Vous êtes mal assis peut-être ? Laissez-moi rien qu'une dernière chance.
Vous savez c'est étrange, on dirait que les hommes s'attachent à tout, même à la souffrance. Il y a toujours cet élan
qui nous pousse à trouver du bon dans le plus immonde. Faut que j'vous plante le décor ? Faut que j'vous dise les morceaux de caravanes ? La forêt à côté, les bouts de tôles près des arbres. Loin des autres, après la forêt, c'est un univers tordu.
La caravane, c'est chez moi maintenant, il fait froid là-bas mais au moins ils ne sont plus là.
Un quotidien de jeux sur sa peau, vous êtes humains vous aussi, et votre peau comme la mienne, a dû manquer d'une autre peau. Sans elle, la nuit est trop seule, et la sueur malsaine.
J'aimerai encore subir sa parole, l'écouter bêtement, d'être son pantin, son jouet. Et ne plus avoir à réfléchir...
J'aimerai me coucher à ses côtés, et dormir, sereinement, tranquillement. Je m'invente mille histoires, mille espoirs, croisant des femmes, du genre de celles à cabas, qui sortent des grands magasins, heureuse de leurs achats, de la lingerie peut-être...Les inviter à boire un verre, leur offrir une cigarette, qu'elles y posent leur lèvre...Leur mentir ma vie, et qu'elles quittent leur mari pour moi.
Et je n'ai plus que les mots de la politesse, les "bonjour", les "merci" les "au revoir", je ne sais plus ce qu'il faut dire , comment se tenir. J'ai oublié les codes, la solitude a tout vidé.
Je n'ai plus que des photos au mur, des moments avec elle, quand je lui jouais du piano, quand nous sortions avec des amis, nous tenions même des conversations. Tout allait très vite, le dimanche on pouvait rester au lit tout la journée
de ces temps là. Je voudrai juste un instant, pour le chérir, l'entretenir à mes yeux, le faire durer le plus longtemps possible, juste un instant pour peser moins lourd...
J'en suis là, à viser le minuscule, à caresser sans cesse son absence, à voir cette femme, pour un jour.
Je m'en contenterai,
Je m'en contenterai.
De là mon goût de n'avoir d'attention que pour les restes, je suis un voleur de cendre. Je suis l'homme d'après, d'ensuite,
qui ne donne jamais la vie, qui la redonne seulement. J'attend que le monde digère et recrache. Je n'agis pas avant.
Je déniche une vie hors du monde, il n'y a que les poules, mon chien et le silence.
C'que je préfère, c'est m’asseoir avec eux le soir devant la caravane.
Ces gens, ils sont comme mes poules, ils gloussent, ils n'ont rien au fond des yeux.
Ils sont dans les choses jusqu'au cou, on leur jette du grain, ils accourent. Et pourtant ce sont eux qui me traite de sauvage. Ils n'ont pas compris que ça ne sert à rien d'être une vague qui avance, qui avale. Mais qu'il faut écouter ces silences, rester en suspend au dessus, à regarder le monde s'engloutir. Ne pas le coller mais trouver le contre temps. Étre le sillage seulement.
Ces gens qui s’éreintent pour oublier, tentent de fuir leur malaise, ils se donnent du mal au lieu d'écouter leur silence
Laissons-le parler.
Comment vous dire, la première fois, ce fut une grosse claque, j'ai aimé tout de suite, un coup de foudre absolu....les poils qui se dressent sur les bras, le frisson le long de la colonne...à chaque écoute, encore et toujours, je ne me lasse pas. Cabadzi est un auteur incroyable, ca faisait des millions d'années que je l'attendais, il me fait du bien : achetez son album, ou volez le, mais surtout écoutez le !